« Connaître sert beaucoup pour inventer. » (Mme de Staël)

Soupers d'Ancien Régime

Mémoires (Mme de la Tour du Pin)   Mme de La Tour du Pin laisse des Mémoires d'une femme de cinquante ans qui sont un témoignage de la vie de cour à la fin de l'Ancien Régime ainsi que de la vie des émigrés. Ses anecdotes ne sont pas dépourvues d'humour.

   Elle dit, à propos des soupers :

   « C'était une grande affaire, dans ce bon temps où l'on n'avait pas encore songé à la représentation nationale, que la liste d'un souper. Que d'intérêts à ménager ! Que de gens à réunir ! Que d'importuns à éloigner ! Que n'aurait-on pas dit d'un mari qui se serait cru prié dans une maison parce que sa femme l'était ! Quelle profonde connaissance des convenances ou des intrigues il fallait avoir ! »   

   Sous Louis XV, ce n'étaient encore que d’aimables réunions avec un nombre limité de convives judicieusement choisis qui partageaient une cuisine raffinée et où l’art de la conversation était à son apogée. On les appelait les soupers « priés » (on était « prié » d’y assister).

   Mais sous Louis XVI, ces petits soupers deviennent des réceptions onéreuses et immenses où l’on tient table ouverte à tout-venant. Les Goncourt, grands amoureux du 18e siècle, parlent de « révolution fatale qui devait transformer peu à peu le salon en un lieu banal, presque public, où la conversation allait s’éteindre sous le bruit, où la société n’allait plus se reconnaître. »

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