« Connaître sert beaucoup pour inventer. » (Mme de Staël)

Médée (Corneille) : oral agrégation de Lettres 2012

Rapport du jury d'agrégation

   En 2012, dans le cadre de « Théâtre et violence », Médée de Corneille était au programme (entre autres) de l'agrégation de Lettres (oral).  

Rapport du jury (extraits)

   « ... La théâtralité de Médée a été largement sous-estimée. Médée, sa « grotte magique », sa baguette qui ne l’est pas moins, et son « char tiré par deux dragons », méritaient mieux que des commentaires purement psychologiques : d’aucuns, qui la jugeaient « très humaine », « sensible », « juste », mais non moins « spontanée », n’étaient pas loin d’en faire une baby-sitter idéale.  On regrette d’autant plus cette ignorance de la théâtralité que l’édition de la pièce était précédée de l’« examen » de Corneille, revenant sur ses choix, exprimant tel ou tel repentir d’auteur, jugeant telle scène inutile ou manquée. Ceux qui ont su recourir intelligemment à cet outil de travail, tout comme ceux qui avaient eu la curiosité de lire les versions de Sénèque ou d’Euripide, ont généralement proposé des commentaires plus riches.  Le manque de culture a également desservi les candidats, dont pas un ne semblait savoir, par exemple, qu’on chassait et brûlait les « sorcières » à l’époque de la rédaction de Médée. Plus grave, la lecture de l’« examen » de 1660 a conduit certains à supposer que Médée datait de la même période ; or la pièce avait été jouée dès 1634-1635 et était considérée comme la première tragédie de Corneille. Cette information privait de sens les commentaires visant à retrouver dans Médée des caractéristiques des pièces ultérieures, voire des constantes des tragédies cornéliennes, d'autant que le dramaturge composait là une tragédie mythologique alors même que Mairet, Scudéry ou Benserade donnaient déjà leurs tragédies historiques. Les candidats, en tenant compte de la place de Médée dans l’œuvre de Corneille, pouvaient simplement souligner la mise en place d'éléments que l’auteur reprendrait ensuite, sans chercher pour autant à nier la singularité de cette tragédie dans sa production. On apprécierait enfin que les candidats usent de notions critiques avec précision : l'expression d’« ironie tragique », très en faveur, ne signifie pas simplement que le spectateur qui connaît l’histoire de Médée en sait plus long que les personnages du drame. Si tel était le cas, toute tragédie mythologique ou historique en serait l’illustration. La notion n'est pas toujours allée de soi (elle a notamment été vivement critiquée par August Wilhelm Schlegel) et son usage ne devient intéressant que dans la mesure où il permet de mettre au jour le fonctionnement du texte : lorsqu’un personnage, pour échapper au destin qui lui est annoncé, accomplit des gestes ou prononce des paroles qui scellent cette destinée, on peut en tirer des commentaires qui touchent à la réception du passage par le spectateur. »

_ _ _ Fin de citation

Un sujet de dissertation plus abordable : Médée et L'Illusion comique

   Pour obliger les élèves/étudiants à lire en même temps deux des pièces du début de la carrière de Corneille qu’on n’ouvre jamais : "En comparant Médée, tragédie de la magicienne et l’Illusion comique, comédie du magicien, montrez le rôle de la magie..."

« Ce mage, qui d’un mot renverse la nature,

N’a choisi pour palais que cette grotte obscure.

La nuit qu’il entretient sur cet affreux séjour,

N’ouvrant son voile épais qu’aux rayons d’un faux jour,

De leur éclat douteux n’admet en ces lieux sombres

Que ce qu’en put souffrir le commerce des ombres. »

[...]

   Remarque 

   Le jeune Corneille triomphe en 1636 grâce à son Illusion comique (1636), joué dans le tout nouveau théâtre du Marais (1632). Il conclut la pièce par un hymne au théâtre, « l'amour de tous les bons esprits, / L'entretien de Paris, le souhait des provinces, / Le divertissement le plus doux de nos princes, / Les délices du peuple, et le plaisir des grands. »

    Autre sujet de dissertation possible sur le pouvoir de l'illusion : « D’après l’Illusion comique montrez le rôle de la magie dans l’œuvre de Corneille. »

Une scène abordable : Acte V, scène 2

   Médée, répudiée par son mari Jason, envoie à Créon, roi de Corinthe, et à Créuse sa fille, nouvelle épouse de Jason, la robe empoisonnée qui les tuera. Suit ce monologue :

"Est-ce assez, ma vengeance, est-ce assez de deux morts ?

Consulte avec loisir tes plus ardents transports

...

Allons à son trépas joindre ce triste ouvrage."

_ _ _

   On peut réfléchir aux question suivantes :

- Comment Médée justifie-t-elle son acte monstrueux et son choix tragique ?

- Comment Corneille rend-il Médée pathétique ? (rythme, sonorités, etc.)

- Quels sentiments contradictoires exprime-t-elle (champs lexicaux) ?

- En quoi ce monologue fait-il de Médée une héroïne tragique ?

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Un corpus sur le mythe de Médée

  • Corrneille, Médée, acte V scène 6 (1635) 
  • Euripide, Médée, scène XX (431 av JC)
  • José Maria De Heredia, "Jason et Médée", Les Trophées (1893)
  • Alphonse Mucha, affiche du spectacle Médée, Théâtre de la Renaissance (1898)

 

Médée, Affiche de Mucha, Théâtre de La renaissance (1898)

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Date de dernière mise à jour : 26/02/2022