« Connaître sert beaucoup pour inventer. » (Mme de Staël)

Fables, Livres VII à XI, Avertissement

   "Voici un second[1] recueil de fables que je présente au public. J’ai jugé à propos de de donner à la plupart de celles-ci un air et un tour un peu différent de celui que j’ai donné aux premières, tant à cause de la différence des sujets, que pour remplir de plus de variété mon ouvrage. Les traits familiers que j’ai semés avec assez d’abondance das les deux autres parties[2] convenaient bien mieux aux inventions d’Ésope qu’à ces dernières, où j’en use plus sobrement pour ne pas tomber en des répétitions ; car le nombre de ces traits n’est pas infini. Il a donc fallu que j’aie cherché d’autres enrichissements et étendu davantage les circonstances[3] de ces récits, qui d’ailleurs me semblaient la demander de la sorte : pour peu que le lecteur y prenne grade, il le reconnaîtra lui-même ; ainsi je ne tiens pas qu’il soit nécessaire d’en étaler ci les raisons, non plus que de dire où j’ai puisé ces derniers sujets. Seulement je dirai, par reconnaissance, que j’en dois la plus grande partie à Pilpay[4], sage Indien. Son livre a été traduit en toutes les langues. Les gens du pays le croient fort ancien, et original à l’égard d’Ésope, si ce n’est qu’Ésope lui-même sous le nom du sage Locman[5]. Quelques autres m’ont fourni des sujets assez heureux. Enfin j’ai tâché de mettre en ces deux dernières parties toute la diversité dont j’étais capable."


[1] Il comprenait les livres VII et VIII, parus en 1678, et les livres IX, X et XI, parus en 1679.

[2] Elles renfermaient les 6 premiers livres parus en 1668.

[3] Terme de rhétorique désignant, dans l’art de développer, « ce qui a rapport à la personne, à la chose, au lien, aux moyens, aux motifs, à la manière et au temps. » (Littré).

[4] Sous l’influence du voyageur Bernier (qui revient des Indes en 1669), La Fontaine puise aux fabulistes de l’Orient. Un « sage indien » (Bidpaï), pour les emprunts qu’il a fait à son livre : Le Livre des Lumières ou la Conduite des Rois, composé par le sage Pilpay, indien, traduit en français par David Sahib d’Ispahan, vieille capitale de Perse, publié en 1644 par le libraire Siméon Puget.

[5] Personnage imaginaire sous e nom duquel avait été mise la traduction arabe des fables d’Ésope.

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Qu’est-ce qu’une fable ?

   Du latin fari qui signifie parler, les fables sont des paroles au sens caché, que ce soient des apologues ou des allégories. L’apologue est un court récit détaillé qui expose un enseignement sous forme allégorique, dont l’origine remonte à Platon.  Souci de plaire et de frapper l’imagination mais surtout instruire. Il s’agit donc d’une stratégie didactique.   

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Date de dernière mise à jour : 30/03/2021