« Connaître sert beaucoup pour inventer. » (Mme de Staël)

Opinion publique

Pour une naissance de l'opinion publique

   Il est à peu près acquis que l’opinion publique naît véritablement au 18e siècle. Toutefois, dès le 17e, la société nobiliaire française dispose d’un public de lecteurs, spectateurs et auditeurs qui font confiance à leur capacité de jugement dans le domaine esthétique, psychologique et moral. Cette « modernité » ne serait-elle pas née avec la sociabilité de l’Hôtel de Rambouillet ?

   Certes, ce public ne prend une position critique envers l’autorité constituée qu’après 1715. Robert Darnton[1] a montré que les éditions clandestines à caractère scandaleux et pornographique ont joué un rôle important auprès d’un public populaire avide de ragots pour désacraliser l’autorité constituée.

   On peut toutefois noter que lors des mouvements de la Fronde[2], des disputes jansénistes et des discussions littéraires, la société civile fait entendre ses convictions.

   Marc Fumaroli, dans son ouvrage Le Poète et le Roi. Jean de La Fontaine en son siècle (Fallois, 1997), souligne une contestation souterraine de l’élite envers la politique absolutiste de Louis XIV. Mais pas seulement dans le domaine politique : le chevalier de Méré revendique l’autorité du jugement du Grand Monde sur la cour, pour ce qui est de la nouvelle sociabilité et de la culture mondaine : la cour n’est plus un modèle[3].   


[1] Edition et sédition. L’Univers de la littérature clandestine au 18e siècle (Gallimard, 1991).

[2] Les « mazarinades » et les pamphlets.

[3] Norbert Elias, dans son ouvrage La Société de cour (Calmann-Lévy, 1974) pense au contraire que la cour est le modèle d’où procèdent le bon goût et les manières.

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