« Connaître sert beaucoup pour inventer. » (Mme de Staël)

Salon de Mme du Deffand

   Couvent des Filles de Saint Joseph

   À la mort de son mari, elle s'installe au couvent de Saint-Joseph, rue Saint-Dominique, dans les appartements jadis occupés par Mme de Montespan [qui avait fondé ce couvent], où, à partir de 1749, elle tient un salon qui brille du plus vif éclat : philosophes, artistes, écrivains et aristocrates cultivés s'y réunissent et, si Voltaire et D'Alembert sont ses plus intimes convives, on rencontre aussi chez elle des écrivains aussi illustres que Fontenelle, Marivaux ou Sedaine, des philosophes comme Helvétius, des sculpteurs comme Falconet, des architectes comme Soufflot ou des peintres comme Van Loo ou Vernet.

Le couvent des Filles de Saint-Joseph aujourd'hui

   Le salon de Mme du Deffand est décrit et connu dans toute l’Europe, notamment grâce à la Correspondance littéraire du baron Grimm à laquelle sont abonnées toutes les têtes pensantes de l'Europe des Lumières.   

   « Les murs du salon sont tapissés d’une moire bouton d’or commandée à Avignon avec des nœuds couleur de feu. Le même tissu orne les rideaux et les portes. Il a vue sur le jardin. On remarque deux commodes Régence, un secrétaire en noyer et une profusion de sièges en noyer ou en hêtre sombre recouverts de velours rayé rouge et jaune ou de tapisserie à petites fleurs rouges sur fond jaune. Aux bergères profondes et aux petits canapés s’ajoutent des chaises en prie-Dieu, appelées « voyeuses », sur lesquelles les hommes posent un genou pour voir jouer les invités au piquet ou à l’écarté autour de deux tables de jeu couvertes de drap vert. Trois trumeaux formés de glaces superposées sont placés sur les murs : l’un d’entre eux se trouve au-dessus de la cheminée dont la plaque en fonte porte l’écusson accolé des Mortemart et des Montespan. 

Chats de Mme du Deffand   Pour les soirées plus intimes, la chambre à coucher qui donne également sur le jardin est utilisée comme un deuxième salon, tendu comme le premier. Avec ses baguettes dorées, son important trumeau surmonté d’un tableau-paysage, son beau lustre de cristal à cinq branches monté en cuivre argenté, ses neufs candélabres à trois branches, cette pièce paraît encore plus riche que la première. Son mobilier comprend entre autres un lit à la polonaise recouvert de perse à grands ramages, douze fauteuils cabriolet, cinq fauteuils à la reine, une ottomane à quatre places et le « tonneau » - son fauteuil - au dossier recourbé. À côté de la cheminée, il y a une grande bergère sous laquelle on cache les paniers remplis de pelotes de laine et d’ouvrages de tapisserie. On remarque aussi une desserte en acajou recouverte de marbre, un cartel et une bibliothèque remplie de livres. Dans l’angle, une encoignure chargée de vaisselle de porcelaine. Et des chats…

   Le cabinet de toilette, exposé comme le pièce précédentes, est décoré par des panneaux recouverts d’un papier peint bleu, encadré par des baguettes gris-blanc et ornés d’estampes ou de dessins ovales ou carrés. Les rideaux sont en vieux damas bleu.

   Dans toutes ces pièces, il y a des guéridons, des étagères murales, de petits meubles à la mode où sont posés livres et porcelaines... »

   Devenue aveugle en 1752, elle prend pour lectrice Mlle de Lespinasse, qui la quitte avec éclat en 1763 pour ouvrir son propre salon, toujours rue Saint-Dominique, quelques numéros plus loin...

(Sources : Madame du Deffand, Inès Murat, Perrin, 2003)

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